GRAINE Poitou-Charentes
Réseau d’éducation à l’environnement en Poitou-Charentes

Accueil > Questions de fond > Le jeu : repères et controverses > La Guilde des vautours en Europe : un jeu prototype créé pour un parc (...)

La Guilde des vautours en Europe : un jeu prototype créé pour un parc animalier et pédagogique (Marie VIVIEN et Benoît CHRISTEN)

jeudi 13 janvier 2011, par Marie ERAUD

|

Article extrait de la Lettre du GRAINE n°19, 2010.

Article de Marie VIVIEN (1) et Benoît CHRISTEN (2)


La Guilde des vautours en Europe est un jeu prototype créé par l’Ifrée et la Maison du Marais poitevin en collaboration avec l’équipe pédagogique de Zoodyssée, le parc animalier et pédagogique des Deux-Sèvres qui accueille entre autres des vautours.

Contexte :
L’équipe pédagogique de Zoodyssée propose depuis plus de 10 ans à ses visteurs une animation sur la découverte des vautours. Au travers de la présentation du vautour fauve, l’approche cognitive utilisée permet d’illustrer le rôle des charognards dans l’écosystème montagnard. Suite aux formations menées à Zoodyssée avec l’Ifrée, il a semblé intéressant de diversifier les approches utilisées lors de ces séquences. Les formateurs intervenants sur le stage « Concevoir un jeu de société pour sensibiliser à l’environnement » ont proposé de collaborer avec l’équipe pédagogique en place dans l’élaboration d’un jeu sur la « guilde des vautours ». Celui-ci sera proposé en amont des animations afin de sensibiliser le public à la notion de conformation morphologique (adaptation physique) et plus particulièrement à celle de guilde par l’exemple de la complémentarité des différentes espèces de vautours dans l’élimination des carcasses.

Objectifs pédagogiques :
Découvrir 4 espèces de vautours européens nécrophages et leurs spécificités alimentaires.
Découvrir les notions d’adaptation et de guilde.
L’approche par le jeu a été choisie pour la phase de sensibilisation en amont de l’animation.

Particularités du contexte :
Parties de jeu assez courtes pour permettre plusieurs parties et un temps d’exploitation des résultats produits par le jeu à la fin de la partie.
Des règles expliquées et intégrées en 1 min : besoin d’une autonomie rapide des joueurs car le jeu s’adresse à un public familial sur un temps de loisir. Les règles doivent être simples pour que l’accroche, l’envie de jouer, reste intacte.
Le jeu doit permettre à tous de jouer sans aucune connaissance préalable.

Contenu du jeu :
Un plateau de jeu qui représente en relief une forêt et une montagne avec à son pied le dessin d’une prairie d’altitude.
Une dizaine de plaques pour former la montagne.
Une dizaine de plaques et de cubes pour former la forêt.
Un sachet de petits cailloux.
4 carcasses de mouflon, chacune composée de pièces de bois emboîtées sur quatre niveaux. Du haut vers le bas : 2 morceaux de viscères (marron), 2 morceaux de muscles et de tendons (rouge), 2 morceaux de moelle (jaune) et enfin 2 morceaux d’os (blanc).
Deux dés identiques à 6 faces avec sur chaque face : un vautour fauve (marron), un vautour moine (rouge), un percnoptère (jaune), un gypaète barbu (blanc), un ours brun, un caillou.

But du jeu :
Chaque joueur a une carcasse de mouflon tombé de la falaise dont il doit se débarrasser le plus vite possible en permettant la venue des vautours dans le bon ordre.

Les actions du jeu :
Chaque vautour a une niche alimentaire spécifique et ne peut se nourrir sur une carcasse que dans un certain ordre qu’il faut respecter. En premier le vautour fauve pour les viscères, en second le vautour moine pour les muscles et tendons, en troisième le percnoptère pour la moelle et en dernier le gypaète barbu pour les os.
Mais il faut faire vite avant que l’« ours brun » n’intervienne et ne perturbe le repas des vautours. En effet contrairement aux vautours, il n’aime pas manger à découvert et tente d’emmener les carcasses à couvert sous les arbres.
A chaque fois qu’un joueur tombe sur cette face du dé, l’ours tire les carcasses de tous les joueurs sur l’une des 6 cases qui les séparent du bois.

Quand un joueur tombe sur la face « caillou », le joueur qui a lancé le dé doit poser un caillou en équilibre sur le sommet de la montagne (le plus petit espace). Si le caillou tombe de la montagne, il fera peur aux vautours les faisant décoller et obligera le joueur à passer son tour. Par contre, s’il réussit il aura le droit de choisir le vautour qui l’arrange pour se débarrasser au plus vite de sa carcasse, puisqu’à chaque lancé des dés, on peut choisir l’un ou l’autre en fonction du tirage qui arrange le plus le joueur.
Par contre, quand un des dés tombe sur la face « caillou  », c’est cette action de jeu qui doit être effectuée.

Fin de partie :
Il y a deux conditions : soit un joueur réussit à se débarrasser totalement de sa carcasse donc il remporte la partie ; soit l’ours tire les carcasses sous les arbres, les vautours ne sont pas rassasiés et tous les joueurs ont perdu, aucun joueur n’aura réussi à se débarrasser de toute sa carcasse, l’ours ne mangeant pas les os.

Déroulement de la séance :
-  Introduction de la séance et explication des règles.
-  1ère phase : au minimum deux parties de jeu.
-  Exploitation des résultats obtenus : rôle et particularités des oiseaux découverts
-  Découverte des vautours présents sur le parc.
Intérêt éducatif du jeu :
De par ce qu’il représente de la réalité :
-  Ces quatre vautours existent et ont bien des niches alimentaires spécifiques et qui s’enchaînent. Tant que la peau n’est pas percée par le vautour fauve et que les muscles et les tendons ne sont pas mangés par le vautour moine, le gypaète barbu ne pourra pas manger les os, sa conformation morphologique ne lui permettant pas d’y accéder.
-  Les ours aiment réellement manger plutôt à couvert. Les vautours sont très peureux et préfèrent les endroits dégagés pour voir arriver le danger et pouvoir s’envoler grâce aux thermiques.

Le jeu permet au public au travers de ces règles de se familiariser avec ces espèces et le fait qu’elles sont interdépendantes. Le niveau de stratégie est léger et les règles sont volontairement simples pour permettre une appropriation rapide pour un panel d’âge du public assez large.

Le temps d’exploitation permet d’initier le questionnement et d’introduire les différents sujets abordés durant l’animation : notion de guilde, d’adaptation ou de conformation morphologique (plumage, bec…), de nécrophage, le statut de ces espèces en France et en Europe.

Limites du jeu :
Le niveau de stratégie est assez faible car on ne peut pas faire autrement que de tomber sur les bons vautours au bon moment. On peut à la limite décider d’utiliser le tirage d’un dé plutôt que d’un autre mais pas plus.
Étant donné les contraintes présentées ci-dessus, des compromis entre le réalisme des mécanismes existants et le fonctionnement du jeu ont été nécessaires :
- montrer le phénomène de guilde : il y a seulement deux lieux en France où vivent les deux espèces : le vautour fauve et le vautour moine nichent en sympathie dans les Causses et dans les Baronnies. De ce fait et par opportunisme, leurs régimes alimentaires peuvent se chevaucher,
- le choix des espèces présentées : ce jeu ne présente que 4 espèces nécrophages mais il y a beaucoup d’autres espèces qui s’alimentent sur une carcasse,
- le fait de poser des cailloux sur la montagne : même si le phénomène d’éboulement existe et peut aller jusqu’à recouvrir une carcasse, la cause est naturellement plutôt due à l’érosion de la montagne et non à l’action d’un homme,
- la représentation de la carcasse est simpliste : représentation des éléments qui la composent en seulement quatre grands blocs et composés eux mêmes de deux morceaux pour représenter des quantités qui ne sont n’est pas nécessairement équivalentes l’une par rapport à l’autre dans la réalité comme elle l’est dans le jeu,
- l’enchaînement des espèces de vautours n’est pas aussi strict. Du moment que leur nourriture est accessible, on peut voir deux espèces au même moment chacune à un bout de la carcasse C’est pourquoi chaque carcasse se divise en deux parties et peut permettre à un joueur d’avoir enlevé sur une partie les os tout en ayant encore des muscles.

Ce jeu est encore à l’état de prototype. Il a été testé avec les équipes de l’Ifrée et de Zoodyssée ainsi que dans le cadre du stage « Faire du parc animalier un espace de sensibilisation à l’environnement ». Il va être réalisé cet hiver pour être utilisé lors de la saison estivale 2011 avec le grand public : illustration et réalisation des pièces de bois (forêt, carcasses, montagne). Il reste encore à faire des réglages statistiques sur la quantité d’embuches à mettre en place sur les dés.

Quelques commentaires de testeurs :
« Quoique n’étant pas une joueuse dans l’âme, je me suis laissée prendre par le jeu au bout de quelques tours, du fait notamment et surtout des « embûches » placées sur les dés ».

« En plus d’être ludique, ce jeu possède l’avantage de bien faire comprendre le mécanisme de la nécessaire succession des espèces de vautours et les conditions nécessaires à leur intervention (à découvert) ».


1 Ifrée.
2 Maison du Marais poitevin.

Site et Infolettre édités avec le soutien financier de la Région et de la DREAL Nouvelle-Aquitaine